Blog Nature
Transhumance hivernale
Quittons pour un moment ce coteau ensoleillé – fief de notre Bruant jaune - où en ce début avril les arbustes laissent éclater leurs bourgeons, illuminant les herbes sèches de tendres verdures.
Un chemin de terre conduit dans la forêt toute proche et à ce sous-bois, là où son trille retentissant, m’a sorti de ma rêverie. Ils s’étaient mis à deux, se haranguant avec véhémence de part et d’autre de la piste forestière !
Quelle sonorité, quelle effervescence dans cette strophe saccadée, jaillie de la gorge de cette petite boule de plumes !
A mon approche, une succession de remontrances courroucées ont pris le relai : une cascade de ‘titititititic’ suivis de roulements ‘trrrrt tserrrrt’ de crécelle.
Une fois calmé devant l’absence de danger – un canal infranchissable nous séparait – mon gnome reprit ses occupations, se faufilant habilement telle une souris entre les branchages.
Bientôt je le vis nanti d’un brin de mousse dans le bec, c’est donc qu’il construisait son nid fait de mousse, de poils, de plumes et de feuilles sèches!
Les rencontres avec le furtif Troglodyte gardent à tous les coups leur effet de surprise, tant rien ne nous prépare à croiser ce minuscule passereau tout rondelet qui mène sa vie dans l’ombre de tous…
Il porte bien son nom, dédié aux habitants des grottes de jadis. Infatigable, jamais tranquille, il passe son temps entre trous, recoins, cachettes, tas de branches, broussailles et racines enchevêtrées… à sautiller plutôt que voler, queue dressée, explorant sans répit ces mille lieux qui pourraient renfermer LE trésor qui aurait encore échappé à sa minutieuse inspection, avant de célébrer la victoire d’une fructueuse trouvaille !
L’on en vient à se demander comment se fait-il qu’un être si peu voyant, aux allures si circonspectes, évoluant si près du sol, loin du ciel, puisse mettre tant de conviction et de vigueur à nous clamer sa présence…
Et s’il était le gardien d’un secret bien caché ?
Il m’a fallu patienter pour en percer le mystère ; à comprendre que ces strophes scandées avec autant de puissance cherchaient à éveiller en nous des forces endormies !
A nous révéler l’infini champ de liberté dont bénéficie la vie organique dans ce concours de circonstances favorables que se partagent les êtres de la forêt.
Voilà donc dévoilé le secret de ce petit lutin facétieux : orchestrer le jeu des créativités entre les différentes sources de vie en nous invitant à la restauration de cette matière organique qui, loin de dépérir ou putréfier se prépare à la célébration incessante de nouveaux commencements.
CPG, 10 avril 2025