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Contenu naturaliste par Christophe Perret-Gentil
6. La Bergeronnette grise

6. La Bergeronnette grise

Les Oiseaux annonciateurs du printemps : les migrateurs

Début mars, la Bergeronnette grise parée de tons bien contrastés de noir, de blanc et de gris est la toute première à nous revenir de ses quartiers d’hiver du nord de l’Afrique.

Son arrivée m’enchante d’autant plus qu’elle coïncide au retour à la vie extérieure après la pause hivernale,  aux retrouvailles avec les travaux champêtres, autour de la ferme, la sortie du bétail et l’activation des chantiers de tout ordre.

Bien qu’affectionnant l’élément Eau : berges de ruisseaux, rives sablonneuses, bancs de graviers… cela fait belle lurette que la Bergeronnette a renoncé à l’exclusivité de cet élément pour étendre ses quartiers à une grande diversité de milieux, jusqu’à devenir une espèce pleinement anthropophile. Il n’est qu’à la voir trottinant  agilement dans la terre fraîchement retournée des sillons… Champs, prairies et pâtures ; zones industrielles ; espaces de loisirs tels que terrains de golf, parcs, pelouses et jardins ; habitations rurales, bords de chemin et de routes, stations d’épuration… obtiennent ses faveurs, jusque dans les espaces périurbains. Tout lui va. Elle se sent partout chez elle du moment qu’elle y trouve des zones dégagées pour sa subsistance et quelqu’anfractuosité pour y établir son nid négligé, dans des endroits parfois des plus insolites comme des machines de chantiers qui se déplacent !

Et il n’est pas chalet d’alpage ou buvette de montagne qui n’héberge son couple de Bergeronnettes !

La familiarité de cet oiseau de la plus sobre élégance est des plus remarquables, tant il semble prendre plaisir à accompagner l’humain dans ses tâches du matin au soir. Passe-t-on la charrue, la herse ou la faucheuse, décape-t-on le sol ou remue-t-on sables et graviers, sort-on le troupeau à la pâture…Partout l’humeur folâtre de ce volatile à la silhouette longiligne s’affaire, avec des mouvements vifs et décidés, avec son hochement rythmique de la tête et de la queue, ses sprints pour capturer un insecte…à moins que cela ne soit le fait de quelqu’arabesque  virevoltante.

Ses cris  ‘mouillés’ : « tchirli » et « chrip » souvent doublé en « tchissic, tchirip » la font reconnaître aisément ;  de même que son fameux « tzit tzit » audible à chaque déplacement qui peuvent servir de cris de ralliement lorsque les oiseaux se déplacent en bandes.

Le chant est un babil précipité et confus, un gazouillis vif à cadence rapide, avec des phrases sans structure apparente. Comme s’il nous disait : « Hé mon coco, tu n’as encore rien vu, la journée est loin d’être terminée, allez, zou, du nerf ! » Pour aussitôt,  l’instant d’après, chercher à partager avec nous l’ivresse des choses en reconnaissant à chaque tâche, de la plus insignifiante à la plus cruciale, sa forme de légèreté… !

Et oui, c’est bien à travers ces gestes du quotidien, constamment répétés, que se tissent les moments heureux de la vie…

Ô fidèle Bergeronnette, sauras-tu un jour quel rôle tu as joué dans ma vie, en m’apportant avec tellement de grâce les réponses de la rivière, de cette eau qui prête sa forme à toute substance de vie ; des montagnes, des étendues arides et dénudées… de ces grands espaces dans lesquels s’effacent les chemins…

CPG, 5 mars 2025, Mercredi des Cendres

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